LA GUITARE SELON PRINCE
Comme nous l’avons vu, le Minneapolis Sound résulte de la fusion entre le rock, la soul et le funk. De par sa personnalité, Prince va transformer l’essai et personnaliser encore le courant dont il est le créateur en lui donnant un son unique.
Naturellement, si l'on commence ce paragraphe avec un célèbre clavier comme illustration, rien ne va plus ! Mais à la base, Prince joue des claviers. Sa progression accompagne l’évolution fantastique des synthés à partir de la fin des années 70.
L’Oberheim, le Yamaha DX7 ou le Roland D50 sont ainsi des jouets pour Roger Nelson dont le son se transforme au fil de la sortie de ces produits. Avec ces nouveaux synthés et la fameuse Linn Drum, Prince crée l’electro-funk.
Mais Prince est également guitariste. Et le mélange des machines et des guitares au son authentiquement rock, voire metal définit le son princier.
INFLUENCES
Côté influences guitares, celle de Jimi Hendrix semble évidente et il est clair que le Voodoo Child a marqué notre homme. Pourtant, il ne revendique pas clairement cette influence.
Selon ses propres dires, il se sent beaucoup plus proche d’un Carlos Santana pour les leads ou du guitariste de James Brown pour les rythmiques funky.
A l’écoute et au regard des amplis utilisés (Mesa Boogie dans la plupart des cas), c’est partiellement vrai. Les leads du prince (Purple Rain) sont en effet chauds et lyriques, à l’image de ceux de Carlos.
Les rythmiques de Batdance ou I wanna be your lover sont de véritables hommages aux plus grands guitaristes de soul et de funk.
Mais certains plans restent directement apparentés à Jimi et à ses héritiers (le guitariste de Funkadelic), comme la fin de Let’s go crazy, ou dans les plans hard funk très fréquents chez Prince.
Au plan purement technique, le jeu est assez sophistiqué. On signalera d’abord des qualités harmoniques exceptionnelles (voir l’analyse de Let’s Go Crazy).
RIFFS, RYTHMIQUES ET SOLOS
Pour les rythmiques, la signature est un mélange de formules issues du rock, du funk et du hard-funk. A titre d’exemple on citera les riffs de Let’s Go Crazy ou Bambi pour le rock, ceux de 1999 et de I Wanna Be Your Lover pour le funk, les rythmiques percussives de Purple Rain et le riff de Get Off en hard-funk.
Les mélanges croches-doubles croches, les dead notes, l’utilisation judicieuse des silences ou des syncopes et autres contretemps sont les bases du language princier en rythmique.
Du côté des leads, l’expression reste la première qualité de Roger Nelson. Il suffit d’écouter le solo de Puple Rain qui est un exemple plus que convaincant à cet égard.
En fait, Prince reste un guitariste au feeling très bluesy (voir les plans de Sign O The Times) doublé d’un lyrisme exceptionnel. Ses gammes de prédilection sont évidemment les gammes de blues.
On trouve d’abord la pentatonique mineure (solo de Let’s Go Crazy) et la pentatonique majeure (solo de Puple Rain). Les gammes de blues au troisième stade sont également fréquentes (Cream, fin de Let’s Go Crazy).
Les croisements sont employés. Ainsi, on trouve une phrase avec ajout de la seconde majeure et de la sixte majeure à la fin du solo de Let’s Go Crazy.
Dans celui de Purple Rain, Prince croise la pentatonique majeure avec la gamme majeure en empruntant la quarte ou la septième majeure à cette dernière.
On signalera encore quelques plans sur les gammes mineures ou les modes mais ils sont plus anecdotiques.
Enfin notre ami est un adepte des parties de guitares harmonisées avec deux, trois, voire quatre voix différentes.
Côté effets de jeu, on retrouve les slides, les hammers, les pull off, les doubles stops, les bends et autres plans hendrixiens à l’unisson. Musicien, compositeur, arrangeur, ou producteur plus que complet, à la personnalité parfois paranoïaque, secrète, tyrannique mais géniale, tel est Prince.
Qui l’aime le suive, mais il faut rendre hommage à l’un des musiciens les plus prolifiques de la fin du vingtième siècle sans lequel bien des courants actuels n’auraient peut-être jamais vu le jour.
JJ RÉBILLARD
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