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19 déc. 2015 17:09
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ANALYSE DES TITRES EN VERSION INTÉGRALE
• HAVE A CIGAR
Une industrie du disque cynique et sans scrupules : écrite par Roger Waters, Have a cigar est l’une des dernières chansons réalisées pour l’album Wish You Were Here publié en 1975.
A cette époque, les membres du Floyd se sentaient victimes de l’incompréhension de leur maison de disques qui faisait monter la pression sur le groupe pour qu’il réitère le succès commercial de Dark side of the moon.
Cette situation tendue transparaît clairement à la lecture du texte (chanté par Roy Harper). Celui-ci symbolise l’image que le groupe voulait donner de l’industrie du disque contrôlée par des bureaucrates cyniques et sans âme, exclusivement mus par l’appât du gain.
Ambiance hypnotique : Ceci explique sans doute également le climat pesant de la chanson, articulée en grande partie autour d’un riff de guitare répétitif et volontairement monotone. L’orchestration fait aussi largement appel aux claviers puisque l’on n’en dénombre pas moins de trois parties différentes : accords de piano électrique, riffs de clavinet et nappes de synthétiseur.
L’ambiance hypnotique des couplets est rompue par l’introduction de passages en 5/4 dans la partie suivante, pour se poursuivre encore ensuite. L’imbrication des diverses parties instrumentales, section rythmique comprise (les bassistes apprécieront sans doute l’inventivité du jeu de Waters) est une vraie réussite en termes de construction, chaque instrument trouvant sa place malgré la densité de l’arrangement.
Riff et rythmique : David Gilmour joue deux parties de guitare différentes, dont une guitare rythmique omniprésente sur le titre, incluant le riff principal dont il décline plusieurs variantes. Pas de grosses difficultés pour ce riff, si ce n’est son interprétation assez contenue, avec un léger bend sur le Sol de la corde grave pour la couleur bluesy, et l’utilisation systématique du vibrato main gauche sur le dernier Sol.
Un peu de concentration sera de rigueur sur la partie suivante pour ne pas oublier le temps supplémentaire dans les passages en 5/4. On note également un court passage arpégé sur la position de DoM, qu’il suffira de déplacer de deux cases pour l’accord suivant (Ré). Au niveau son, optez si vous pouvez pour une Stratocaster (micro chevalet), un son légèrement crunch, un peu de compression et un phaser.
Guitare lead : la guitare solo intervient également tout au long de la chanson, doublant une petite descente sur la gamme blues et quelques traits de la guitare rythmique, pour de courtes interventions en réponse à la ligne vocale, et enfin lors du solo.
Une bonne partie des composantes stylistiques des leads de Gilmour apparaissent ici, dévoilant des subtilités méritant un peu d’analyse. En premier lieu, de nombreuses idées rythmiques émaillent ce solo pourtant relativement simple en apparence.
On remarque entre autres l’utilisation fréquente de triolets de noires, ou des résolutions de phrases sur la seconde double-croche de la mesure, la première double-croche étant occupée par un silence ou une dead-note.
Des bends et encore des bends : attention également à la mise en place des passages en double-stops, joués sur un flux d’aller-retour en double-croches.
Notez également l’astuce consistant à « piéger » une corde lors de l’exécution d’un bend sur la corde supérieure, présente à deux reprises sur le solo.
Soignez particulièrement la justesse et l’expressivité des très nombreux bends, dont certains d’une amplitude d’un ton et demi. Faites le meilleur usage possible de de votre vibrato main gauche, afin de donner à ce solo toute sa dimension.
Utilisez une Fender Stratocaster en position chevalet avec un son saturé et un delay réglé à 422ms, que vous pourrez colorer légèrement à l’aide d’un chorus.
• WISH YOU WERE HERE
Gilmour acoustique : encore un grand tube du groupe qui va vous permettre de tout savoir sur le David Gilmour acoustique.
Le riff caractéristique de ce morceau est joué dès l'intro sur une douze cordes acoustique. Ce riff est basé sur de courtes phrases mélodiques jouées sur les cordes graves (mais au son très brillant du fait de la doublure des notes à l'octave supérieure sur la douze cordes), phrases entrecoupées de jeu en accords.
On notera que les trois accords employés (Mi m7, Sol et La 7sus4) ont en commun les notes Ré et Sol. Et ces deux notes sont tenues tout au long de l'intro par l’annulaire et l’auriculaire de la main gauche, l’index et le majeur se partageant le jeu mélodique.
Une armada de trois 12 cordes : on veillera à bien mettre en avant les parties mélodiques en attaquant franchement avec le médiator, tandis que le jeu en accords sera plus léger. Le but est d'obtenir un certain relief, une bonne dynamique.
Cette partie d'intro sera rejouée tout au long du morceau, dans les sections instrumentales. Une deuxième douze cordes doublera quasiment à l'identique cette partie, une troisième renforcera simplement les phases mélodiques.
Notez que l’on entend une douze cordes alors qu’il y en a trois et que cette technique d’arrangement permet d’obtenir beaucoup de relief et de dynamique...
Solo 1 : le premier solo, pendant l'intro, est joué sur une six cordes. La difficulté tient essentiellement à l'énergie qu'il faut mettre dans le jeu.
Cette énergie se traduit par un vibrato très marqué, pas forcément aisé sur une acoustique, par des bends importants pour lesquels il faudra pousser fortement sur les cordes, et par des articulations très marquées.
Ecoutez attentivement la phrase en double stops (quartes successives sur les cordes de Sol et Si) et notez les notes qui sont tenues et celles dont la valeur est très écourtée.
Il est important de bien respecter ce phrasé pour rester dans l'esprit de l'original.
Solos 2 et 3 : ils sont joués en slide avec un bottleneck. A titre indicatif, utilisez un bottleneck Dunlop en verre. La guitare est accordée en open de Sol. Il suffira toutefois de baisser le Mi aigu en Ré, les deux cordes graves n'étant pas utilisées dans ces solos.
Ces parties sont doublées par le chant dans l'original. Ici aussi, lancez-vous dans le jeu, quitte à n'être pas très juste d'emblée. La justesse viendra avec l'habitude, mais il est aussi important de s'investir pleinement dans le jeu.
JJ REBILLARD avec la participation de PHILIPPE SÉGUIER ET THOMAS HAMMJE
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14 déc. 2015 16:35
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ANALYSE DES TITRES EN VERSION INTEGRALE
• MONEY
Un titre prestigieux de Pink Floyd : et certainement un de leurs plus grands tubes pour entrer dans le vif du sujet. Money obéit au schéma des grandes pièces à multiples tiroirs (Echoes, Shine On Your Crazy Diamond) et est particulièrement intéressant au plan rythmique.
Tout le monde connait bien sa pulsion principale basée sur un riff de basse shuffle en 7/4 et ses décrochements en 4/4 au moment des différents solos et du final.
Utilisez un son de type overdrive sur les parties rythmiques et de type distorsion sur les solos. Ajoutez une réverbe en quantité moyenne et prévoyez un delay à 441ms, que vous enclencherez le moment venu.
Un riff légendaire en 7/4 : on commence avec le doublage du riff de basse. Il s’agit de mémoriser mélodiquement le plan et le fameux 7/4 passera comme une lettre à la poste. Vous devez exercer un muting en laissant toutefois légèrement résonner les notes jouées sur les cordes de Sol et Ré.
Les harmoniques naturelles de la partition correspondent au muting naturel effectué par la main gauche. Dans les faits, il s’agit d’une simple dead note dont l’harmonique résonne légèrement. Réduisez votre volume sur ces 4 premières mesures afin d’obtenir un son crunch.
Dès la mesure 5, la guitare 2 entre en lice. Elle joue un motif qui est complété par le clavier et répond à celui-ci sur les deuxième et quatrième temps, le clavier répondant à son tour sur le septième temps.
Les secrets du groove : l’un des secrets du groove de Money est certainement cette alchimie rythmique en 7/4 obtenue grâce au bon vieux système question-réponse du blues. Notez la guitare 3 qui joue avec un trémolo particulièrement bien vu et est responsable de l’ambiance mystérieuse.
Cette guitare joue sur le premier temps mais vient se positionner régulièrement sur le septième temps dans les couplets. Au refrain, on passe en 4/4 puis en 6/4 avant de revenir sur la mesure 7/4.
Relachez le muting pour exécuter cette partie. Il n’y rien de nouveau à signaler jusqu’au premier solo qui démarre après un crescendo en triolets. Enclenchez le delay car vous allez en avoir besoin...
Solo 1 : En fait, ce solo est doublé sur l’original (une spécialité de David Gilmour) et il est très mélodique. Pour être à l’aise essayez d’abord de le chanter avec l’original. Au niveau de l’interprétation, soignez la justesse des bends qui doivent être très précis.
Les attaques de la main droite seront puissantes et régulières. Techniquement, ce solo n’est pas très difficile. Par contre, vous devez avoir le bon groove car c’est vous qui êtes le leader, même si la batterie complète votre rôle.
Côté mélodique, on joue exclusivement sur la gamme pentatonique mineure, en ajoutant la 6te M à l’aide d’un bend dans la deuxième partie. Sur le slow bend de conclusion, vous devez couper le delay et le contraste est ainsi évident sur le solo 2.
Solos 2 et 3 : Très bluesy, ce solo est toujours construit à partir de la pentatonique mineure. Soignez les stops main gauche qui permettent d’obtenir un son tranchant lorsque les notes sont suivies de silences.
Pour le solo 3, reprenez votre delay. On retrouve encore exlusivement la pentatonique mineure et on constate que l’on peut faire des merveilles avec cette gamme. Ce solo est plus difficile que les précédents et les bends à la case 22 vont vous faire souffrir, d’autant qu’ils doivent être parfaitement justes.
Le coup de grâce intervient lorsque l’on joue le bend de 2 tons à la case 22, sur la corde de Si. Amusez-vous bien...On revient enfin au couplet et on enchaine sur le final. Commencez avec la guitare 2 et prenez le lead à partir de la mesure 14. Celui-ci est tout en finesse et c’est encore du grand art selon David Gilmour.
JJ RÉBILLARD
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7 déc. 2015 11:31
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 MATOS DE CHOC
David Gilmour est certainement l'un des guitaristes qui a utilisé le plus d'effets tout au long de sa carrière. Celle-ci étant très longue, s'étirant sur plusieurs décennies, il est clair que la liste peut être longue voire interminable.
Du plus vintage des matos des 60's aux multi-effets numériques les plus audacieux actuels en passant par les pédales Electro Harmonix des années 70, toute la panoplie des pédales Boss et autres univibes, et j'en passe...
Un de ces matos de légende est certainement la chambre d'écho Binson Echorek à disque, un avantage par rapport aux bandes des chambres d'écho classiques qui s'usaient rapidement
Il fallait en effet toujours avoir une quinzaine de bandes en réserve car elles étaient souvent en rupture de stock).
On peut donc considérer que David Gilmour a utiisé 99% des effets produits de 1960 à nos jours. Vous comprendrez facilement que l'on ne puisse citer tous les instruments, amplis et effets du maitre mais en voici une petite liste exhaustive...
• GUITARES
David Gilmour joue presque exclusivement sur des Fender Stratocaster. Il en possède des dizaines, de toutes les époques.
Stratos fifties au son vintage, séries L et autres modèles de légende des sixties, strats du début des années 70, mais aussi des guitares plus récentes type Strat Plus.
Ses stratos préférées sont équipées de micros EMG avec électronique active et il utilise un middle-boost qui les transforme en humbuckers.
Signalons encore que David Gilmour doit avoir dans sa collection toutes les couleurs du catalogue Fender depuis sa création et l’inventaire sera presque complet.
Enfin on n’oubliera pas les guitares acoustiques (Martin et Gibson J200) ainsi que quelques Takamine.
• AMPLIS
Sur ce plan D. Gilmour est toujours resté fidèle à Hiwatt (un vrai son, aussi intéressant que le Marshall dans un autre genre).
Il a utilisé plus récemment des Fender Twin Reverb II 100W mais il a bien vite retrouvé ses chers Hiwatt.
Ses baffles sont deux Marshall 4x12 (ce qui explique le son final) et des Hiwatt 4x12.
• EFFETS
On commencera avec un ampli Mesa Boogie qui lui sert de Fuzz-Box. En pressant un bouton, il passe à travers le Boogie et le son est ensuite dirigé vers les amplis de puissance.
La meilleure fuzz, selon ses dires. On ajoutera à cela des pédales Boss (compresseur, équalizer, wah wah automatique et overdrive ou distorsion pour certaines saturations).
Enfin on trouve un delay et un chorus TC Electronics en bout de chaine. Le delay stéro lui permet de séparer son signal en deux.
La première partie reste telle quelle et se dirige vers un ampli. La deuxième passe dans le chorus et va rejoindre un deuxième ampli.
On comprend ainsi beaucoup mieux la diversité des sons du maître mais je dois vous révéler pour finir l’un des secrets du son Gilmour dans les seventies.
POUR AVOIR LE SON DAVID GILMOUR
La guitare : utilisez obligatoirement une Fender Stratocaster pour les guitares électriques et une Martin D28 fera parfaitement l'affaire pour les guitares acoustiques, à moins que vous ne possédiez une Gibson J200.
L'ampli : plusieurs solutions sont possibles, la meilleure étant une tête Hiwatt 100W avec des baffles Marshall. On peut aussi prendre un Marshall ou encore un Fender Twin reverb et des pédales complémentaires pour les sons saturés.
Les effets : au chapitre des effets, la réverbe, le delay, le trémolo, le phasing et le compresseur sont les principaux périphériques employés. Vous pourrez les obtenir en utilisant des pédales ou un multi-effet.
Bien que les saturations puissent être obtenues à l'ampli suivant le type d'ampli utilisé, on ne peut que recommander l'utilisation complémentaire de pédales d'overdrive et de distorsion, du fait de la grande variété des sons saturés.
JJ REBILLARD
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30 nov. 2015 18:48
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REVUE DE DETAILS
Commençons avec les rythmiques. On peut définir quelques grandes tendances que l’on retrouvera dans l’analyse des titres en version intégrale.
On note d’abord les rythmiques en tenues, positionnées sur les temps forts comme sur les temps faibles.
Les riffs et les rythmiques funky à base de doubles croches ponctuées de dead notes sont très fréquents. Dans les plans les plus durs, on n’est pas loin du hard funk.
On trouve également pas mal de riffs et et rythmiques rock classiques en croches, ou à base de mélange croches-doubles croches.
Les riffs et rythmiques caractéristiques du slow blues font encore partie de l’univers Gilmour, comme les séquences arpègées et autres ballades acoustiques en finger ou en flat picking.
Dans l’ensemble, notre ami utilise souvent les renversements d’accords à partir desquels il construit des motifs rythmiques et mélodiques.
SOLOS
Pour les leads, on peut définir huit grandes tendances. La première correspond aux chorus construits sur la gamme pentatonique mineure.
La seconde comprend les les lignes mélodiques basés sur l’utilisation de la pentatonique mineure à laquelle David Gilmour ajoute la 2de M ou la 6te m (technique des croisements). Notons que ces deux notes sont souvent obtenues par bends.
La troisième catégorie est celle des solos crées à partir de la gamme de blues au Ier stade (pentatonique m + blue note I).
On trouve également des chorus basés sur l’utilisation de la gamme mineure harmonique ou encore des lignes mélodiques construits à partir de la gamme pentatonique majeure.
On terminera cette liste avec les solos construits à partir de la gamme majeure en rappelant que David Gilmour est un adepte des lignes mélodiques fonctionnant sur le principe des guitares harmonisées.
En général David Gilmour se sert de tous les effets guitaristiques (hammer on, pull off, slide, vibrato main gauche... ).
Néanmoins on note une prédilection pour les bends de tous types et l’on peut dire que le guitar heroe est « champion es-bends » toutes catégories.
Son vibrato main gauche est redoutable et il utilise fréquemment les doubles stops et les stops main gauche (l’héritage blues).
Les hammers, les pull off et surtout les slides sont presque toujours employés pour servir l’expression, plus rarement la vélocité et il présente un goût plutôt marqué pour le raking et les dead notes.
CRÉATEUR D’EFFETS SONORES
Enfin, David Gilmour a une approche assez spécifique des gammes de sept notes, notamment la gamme mineure.
En fait, il semble jouer en permanence sur la gamme pentatonique mineure et obtient la gamme mineure par des bends savamment calculés.
C’est une autre grande caractéristique de son jeu. Notons également qu’il utilise toutes les positions de la pentatonique mineure, ce qui est assez peu fréquent.
Il se sert toutefois plus souvent de la position courante et passe souvent d’une octave à l’autre afin de créer un système question-réponse (toujours le blues).
On terminera cette liste en rappelant sa science du contrepoint et surtout un jeu unique au bottleneck. N’ayant jamais pu s’habituer à l’utilisation de ce dernier sur une guitare normale, il se sert d’une lap-steel guitar.
En conclusion David Gilmour a une approche unique de la guitare et il a été un grand créateur sur le plan des effets sonores.
Fervent utilisateur de la strato, il fut l’un des premiers guitaristes à exploiter les combinaisons de deux micros, sa position favorite correspondant à l’utilisation du micro manche et du micro milieu.
Sa puissance mélodique est certainement l’un de ses meilleurs atouts et son message est le suivant : la guitare ne doit pas servir de prétexte à une débauche de notes sans saveur et sans âme.
Ce qui compte avant tout c’est la mélodie et l’expression. Avis aux amateurs !
JJ RÉBILLARD
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23 nov. 2015 13:02
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INFLUENCES
Au moment de sa formation, le groupe affirme sa fidélité au blues (son nom résulte de la contraction des prénoms de deux bluesmen peu connus, Pink Anderson et Floyd Council). Mais nous sommes en plein psychélélisme et Syd Barett écoute pas mal de musique indienne.
De plus, ses parties demandent un fort soutien des claviers qui doivent déterminer l’ambiance de base. Ce mélange sera celui de Pink Floyd et David Gilmour ajoutera sa touche personnelle.
Notre ami a grandi au son du blues dont il a conservé les composantes les plus fluides, celles de Big Bill Broonzy et de Lonnie Johnson, mais il a aussi beaucoup écouté les Shadows de Hank Marvin. Il en a conservé l’usage du vibrato (bar) et a été fortement marqué par leur impact mélodique.
Ajoutez à cela l’influence d’Eric Clapton pour son interprétation du blues et son sens aigu de la note bien placée, rythmiquement comme harmoniquement. Finissez avec une pincée de Hendrix et de Jeff Beck pour le côté expérimental et vous saurez de quel bois est fait David Gilmour.
Mais le vrai David Gilmour (entendez celui que vous écoutez dans Pink Floyd) est vraiment né plus tard, en 1970-1971 à l’époque de Meddle, et il parle lui-même de ses soli dans Echoes comme de ses premières vraies parties de guitare. Un mélange de Albert King, Hank Marvin, Jimi Hendrix ?
Il est vrai que le jeu de Gilmour fait parfois penser à celui de ces trois guitaristes mais il semble que son originalité soit vraiment de fruit de sa richesse mélodique. Enfin, il faut rendre à César ce qui lui appartient et on soulignera les grands talents de compositeur de Roger Waters.
Ses trois ex-compères l’aident à mettre en scène la musique mais le son Pink Floyd est peut-être encore plus le fruit de l’imagination de Waters que toute autre chose.
FIGURES DE STYLE
Au plan général les caractéristiques de la musique du Floyd sont les suivantes. On note d’abord un style très symphonique, avec une présence importante des synthés qui dominent largement la guitare sur le plan harmonique.
De plus, le groupe n’hésite pas à utiliser des sections de cordes, des choeurs féminins voire des orchestres classiques entiers. La rythmique est toujours simple mais très fine. La ligne de basse reste entièrement dévouée à la cause mélodique et Roger Waters n’est pas sans rappeler un certain Paul Mc Cartney.
Ses parties rythmiques sont sobres. Dans certains cas il n’hésite pas à employer du delay sur des rythmiques simples qui deviennent alors complexes à exécuter puisque l’on joue avec l’effet au sens propre.
On n’oubliera pas de mentionner l’utilisation de mesures peu courantes ou de mélanges de mesures dans les compositions. Et oui, on peut faire un tube en 7/4 (Money).
Les lignes mélodiques sont très travaillées et partagées entre les voix, les guitares et certains instruments d’appoint comme le saxophone.
D’ailleurs les compos du groupe s’inspirent davantage de la musique symphonique au sens classique du terme que de la chanson.
Ceci explique le partage des mélodies entre la voix et les autres intruments. Enfin le blues est toujours présent, dans les structures comme dans l’expressivité du jeu de Gilmour.
L’utilisation massive d’effets spéciaux sonores ou visuels est la marque de fabrique du Floyd.
Tous les instruments peuvent y avoir droit et être traités avec des delay, des flangers, des harmonisers et autres réverbes spatiales.
Les effets spéciaux visuels, notamment les light shows qui complètent la panoplie et font de chaque concert du groupe un événement.
LA GUITARE SELON DAVID GILMOUR
Laissons David Gilmour se définir lui-même : « j’ai un style particulier, tout simplement parce que j’ai hérité de ces doigts-là, particuliers.
Ils ne sont pas franchement rapides et il y a des choses qu’ils ne peuvent pas faire et d’autres choses qu’ils sont les seuls à pouvoir exécuter ».
Effectivement, regardez les films et les vidéos de Pink Floyd. Les doigts de Gilmour ne lui permettent pas une grande rapidité. Ils sont plutôt trapus et il a dû passer un bon bout de temps à trouver quel parti il pourrait en tirer.
Si vous ne l’avez pas compris vous allez en faire la triste expérience avec tous les bends du maître. Ses doigts ont une force colossale et chez lui, les bends de deux tons voir deux tons et demi sont plus que fréquents.
Et puis, pas de rapidité ? Qu’importe, c’est le blues, l’expression et la force mélodique qui comptent avant tout. Comme quoi une morphologie désavantageuse à première vue peut devenir ensuite un auxiliaire plus que précieux.
Outre ces deux caractéristiques, la force mélodique et l’expression, on retiendra un sens aigu des nuances, un jeu lead prédominant, un son hors du commun avec une panoplie d’effets et une grande inventivité, des rythmiques simples et efficaces.
Enfin, son utilisation bien particulière de la gamme pentatonique mineure qu’il croise fréquemment avec la gamme mineure est une des caractéristiques principales du style Gimour.
JJ RÉBILLARD
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9 nov. 2015 18:17
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SON ET LUMIERE
La musique du Floyd repose avant tout sur un concept qui trouve notamment son illustration dans ses shows.
Dès ses premiers concerts, le groupe innove en utilisant des light-show qui lui permettent de créer une atmosphère en harmonie parfaite avec la musique.
En fait, Pink Floyd fait preuve d’une vision cinématographique de la musique : le groupe se sert d’une panoplie monstrueuse d’effets spéciaux en tous genres dont le nombre ne cessera d’augmenter durant toute sa carrière.
On se souviendra des accessoires géants qui volent au-dessus du public, des projections de films interactifs, des lasers et autres brouillards artificiels.
La musique est véritablement mise en scène et devient le principal centre d’intérêt, bien avant les musiciens.
C’est l’image collective du groupe qui est perçue par le public au détriment des entités individuelles et c’est certainement l’un des points forts de Pink Floyd.
Mais cette vision de la musique ne fait pourtant que reflèter la musique elle-même et la façon dont elle est conçue.
Souvenons-nous qu’à l’origine la musique du groupe est censée correspondre avec le fameux "trip” dont je parlais au début.
Chaque morceau est donc une partie de ce voyage et les différentes parties du morceau sont à leur tour des séquences qui doivent être mises en scène.
SONOSCOPIE De fait, bon nombre de titres du Floyd sont divisés en partie I, partie II, partie III... l’un des must étant sans doute le fameux Shine On Your Crazy Diamond.
Avant de lire les lignes qui suivent, écoutez ce titre qui figure sur l’album Wish You Were Here.
Cette longue plage de 10’38’’ est divisée en plusieurs parties. C’est un peu comme un film qui se déroule dans diffrérents cadres et se divise en autant de séquences.
Le problème est qu’il faut avoir malgré tout un scénario unificateur, un peu comme un fil conducteur : la rythmique et surtout les synthés sont là pour cela, c’est leur rôle.
Les couleurs sont données par la guitare de David Gilmour et par le saxophone final.
Et le son du Floyd peut ainsi se résumer à cette alchimie : la puissance et l’ampleur pour les synthés et la rythmique, avec des nuances superbes qui suivent à merveille le jeu de l’orfèvre Gilmour, celui-ci redessinant les contours de chaque paysage.
Dans Shine On Your Crazy Diamond, on commence avec une première partie entièrement basée sur les synthés qui créent le fondement harmonique et l’ambiance générale du titre. Les mélodies apparaissent bientôt mais restent toujours simples et sont parfaitement adaptées.
Dans la deuxième partie la guitare de Gilmour rentre d’abord discrètement et les synthés passent automatiquement en arrière-plan pour la laisser parler.
Gilmour a alors un son très doux et ses lignes mélodiques sont superbes, simples et efficaces (une véritable marque de fabrique du maître). Puis la guitare disparaît et les synthés sont de nouveau plus présents, envoûtants jusqu’à ce qu’ils s’effacent à nouveau au début de la troisième partie.
Le son de David Gilmour a changé, il est à présent traité à l’aide d'un phaser, la pédale MXR Phase 100.
C’est le riff légendaire, étrange avec une réverbe glacée et une bonne dose d’écho.
On se croirait presque devant une maison hantée ou sur une lande sauvage et l’atmosphère devient presque inquiétante.
La tension est bientôt rompue avec l’arrivée de la basse et de la batterie et le bourdon en Sol disparaît au profit des harmonies qui sont soulignées par la basse.
Notons qu passage que les basses de Roger Waters sont toujours simples mais qu’elles sont aussi caractérisées par une grande finesse.
QUESTION-RÉPONSE
David Gilmour commence alors à établir un dialogue entre deux guitares principales soutenues par une rythmique de base (guitare II).
La guitare I continue le fameux riff et la guitare III lui répond par des accords de puissance dont le son est saturé, avec un petit vibrato caractéristique qui n’est pas sans rappeler celui de Hank Marvin.
On trouve ensuite un premier solo avec un son toujours clean mais un peu plus crunch que dans la deuxième partie. La fin de la troisième partie est marquée par un changement de son et la guitare de David Gilmour devient alors franchement saturée.
Elle "pleure” même pratiquement jusqu’à la fin du passage et c’est le début de la partie IV. Belle progression sonore pour les guitares !! Nouvelle partie, nouveau passage : la guitare passe en rythmique assistée par une deuxième guitare qui effectue quelques réponses. La parole est aux synthés qui jouent une mélodie désormais célèbre.
Puis c’est à nouveau le tour de la guitare pour un deuxième chorus avec un son encore différent de tous ceux qui l’ont précédé. Il s’agit en fait d’une overdrive mais David Gilmour ajoute de nouveau un phaser MXR 100 avec un réglage beaucoup plus drastique qu'au début.
A noter que la pédale Mutron III permettait aussi d'obtenir ce type de son. La cinquième partie va voir l’arrivée du chant (la guitare était jusqu’ici assez mélodique pour compenser son absence).
Gilmour répond au chant avec deux guitares différentes : la première est lead avec un son proche du premier solo (malgré un changement de micro) et la seconde joue des accords saturés qui durcissent le discours car les voix sont très douces.
Les deux parties de chant sont séparées par un lead de guitare en forme de parties harmonisées et David Gilmour n’utilise pas moins de trois guitares pour cette section avec bien sûr trois sons différents, du crunch à la franche saturation.
On passe alors au final : la guitare effectue un arpège discret et laisse le lead à un saxophone dont le chorus est très mélodique, avec quelques effets de jeu digne d’un jazzman virtuose. Ce morceau est donc l’archétype même du son Pink Floyd : riche en atmosphère et en couleurs, ample et puissant, fluide et subtil.
On retrouve cette magie dans bien d’autres titres (Echoes, Money...). En les écoutant, on se demande soudain comment un groupe a pu concevoir une telle musique et quelles sont ses influences.
JJ RÉBILLARD
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